jeudi 1 janvier 2015

« MARCHER A LA QUEU LEU LEU", POURQUOI CETTE EXPRESSION ?




 Cette expression indique que l’on marche les uns derrière les autres.

Mais pourquoi ?

Et bien voilà :
Vers 1080, le mot désignant un loup, était « leu » ou  encore « lou ».
Le « p » à la fin de « lou » apparut à la fin du XIIème siècle

Mais  « leu » qui  s’employa jusqu’au XVIème siècle,  nous le rencontrons encore aujourd’hui dans de multiples expressions dont :

A la queue leu leu :
Phrase très imagée montrant bien la horde se déplaçant « à pas de loup », les uns derrière les autres, le chef de meute, toujours en tête.

De ce carnivore tant redouté, nous vient aussi : la faim fait sortir le loup du bois (1317)
En effet, par grand froid, ne trouvant plus assez de petits gibiers pour se nourrir, les loups affamés quittaient les bois et s’approchaient, à la faveur de la nuit, des habitations des villages, et surtout des bergeries.

Marcher à pas de loup (1611) : marcher sans bruit afin de surprendre plus facilement sa proie.

Entre chien et leu (1230) (expression devenue dans sa forme plus moderne « entre chien et loup ») :
Le soir, avant le noir complet de la nuit lorsque l’on ne peut distinguer, faute de luminosité suffisante, un chien d’un loup.

Avoir une faim de loup : une faim à tout dévorer …….

Se jeter dans la gueule du loup : s’exposer à un danger

Hurler avec les loups : suivre l’opinion générale, sans réfléchir, pour faire comme les autres

Quand on parle du loup, on en voit la queue  (1606) : phrase que l’on dit quand on voit arriver la personne qui occupe, présentement, la conversation.

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En raison des craintes inspirées par le loup, les humains ont attribué son nom à beaucoup de lieux, comme des carrefours, par exemple :
  • Un Carroi de Marlou (carrefour du loup) : Marlou ou marelou ou mauvais loup.

Ces endroits étaient craints et il n’était pas recommandé de s’y attarder à la nuit tombée, car lieu de sabbat et de sorcellerie.
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Maints écrits relatent des faits dans lesquels le loup se trouve être  l’acteur principal  et notamment, des  légendes sur la survie d’enfants abandonnés dans les bois, recueillis et nourris par des louves. Enfants sauvages mi-humains, mi-loups  n’ayant jamais pu marcher qu’à quatre pattes et hurlant telle leur mère nourricière.
Rudyar Kipling, en 1894, inspiré par ce mythe, nous a laissé un de ses plus beaux récits dans lequel Mowgli, petit d’homme, est élevé par une meute en pleine jungle.
Ces « enfants sauvages », ainsi recueillis et ramenés à la civilisation, n’ont jamais vécu au-delà de l’âge de vingt ans.
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La terreur du loup fut largement alimentée par l’affaire de la « bête du Gévaudan », affaire qui a fait énormément de victimes, fait couler beaucoup d’encre et mobilisé les plus grands chasseurs et les commandants de la Louveterie du roi venus de toutes les régions de France dont la Normandie.
L’énigme plane encore aujourd’hui et les plus folles hypothèses ont pris possession de ce drame qui a duré des années, aboutissant à l’écriture de rapports et de romans à suspens.
La bête du Gévaudan était-elle un loup de taille incroyable, surnaturelle ?
Y avait-il plusieurs loups tueurs ?
Etait-ce une machinerie politique ?
Etait-ce l’agissement d’une secte ?
A qui profita cette tuerie ? Sûrement pas au peuple qui dut subir la perte de nombreux enfants et d’une partie de leur bétail.

Mais il y a aussi les contes, comme celui de Charles Perrault, le Petit Chaperon Rouge, qui sont des avertissements aux rencontres inopinées dans les bois, loups, certes, mais aussi hommes inconnus. L’homme n’était-il pas un loup pour l’homme ? (Homo homini lopus)
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On ne peut clore ce petit chapitre sur les loups sans évoquer cette légende du loup-garou  (leu warou ou leu garroul – XIIIème siècle) qui prétend que certains hommes peuvent prendre l’apparence du loup. Cette transformation nommée « lycanthropie » venant du nom d’un roi grec, Lycaon, que Zeus transforma en cet animal.
Lycanthropie du grec : « lykos » loup et « anthropos » homme.
Le meneur de loup, pauvre hère parcourant les chemins, accompagné de son loup avait cette réputation de lycanthropie.
Cette transformation diabolique, attestée largement au Moyen-âge, fut l’objet de nombreux procès en sorcellerie. Les tortures, d’une immense cruauté, au cours de la question amenaient des aveux forcés conduisant droit au bûcher.
Au XVIème siècle, trente mille procès de loups-garous ont été enregistrés en France. Une croyance très tenace qui alimente encore l’imaginaire.
Ces hommes aux pouvoirs étranges étaient appelés haires en Normandie et Varous en Bretagne.



Pour cette petite histoire autour d’un mot,
Je me suis aidée du
« Dictionnaire historique de la langue française »
Le Robert

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