jeudi 10 septembre 2015

ANNEE 1764....... QUELQUES CANCANS !




 
Remèdes

6 janvier 1764

« Remèdes contre les maux d’estomac
Plusieurs personnes qui se sont servi de ce remède simple, ont assuré qu’il est infaillible. Sur leur témoigne qui ne paroit nullement suspect, nous le donnons avec confiance, car il est aussi aisé que dispendieux, et que d’ailleurs, nous sommes intimement persuadés que s’il n’est pas efficace pour tout le monde, il ne peut faire mal à personne, pas même à ceux qui sont de la complexion la plus délicate. Nous pensons au reste que s’il ne guérit pas radicalement des maux d’estomac, du moins il peut les soulager, ou bien le principe généralement reçu est faux : amara sunt salubria ; les amers sont toujours très-bons (sic) pour l’estomac. En voici la recette.
Eventrez un carpe, prenez-en le fiel que vous détremperez dans une cuiller à bouche avec un peu d’eau ou du bouillon, avalez ce breuvage, prenez par-dessus une écuelle de bouillon, et vous vous sentirez à l’instant soulagé et guéri radicalement des maux d’estomac de quelque nature et quelque invétérés qu’ils soient (sic). »


Etant donné le goût horrible que devait avoir ce remède…… il devait, en effet,  être très efficace, comme vomitif, en cas d’indigestion !!



27 avril 1764

« Le sieur Boucheron, Apothicaire, Marché neuf, à la Coupe d’Or à Paris ; vend et distribue un élixir stomachique, pour toutes débilités et foiblesses (sic) d’estomac, défaut de coction, de digestion, et perte d’apétit (sic), vomissements résultans (sic) des causes ci-dessus, ainsi que pour le flux immodéré des femmes. Il distribue et vend aussi une boite de Pilules pour les fleurs blanches, dont on joint l’usage à celui de l’élixir stomachique.
On trouve le dit élixir et les pilules chez le sieur Carbonnier, Apothicaire, rue du bac, à Rouen. Il y a un Imprimé  qui instruit de la façon d’en faire usage. Le prix de l’élixir et des pilules est de 6 livres six sols chaque.
Les Personnes qui écriront par la Poste, sont priées d’affranchir les ports de Lettres. »


Pilules et élixir miracles …. Les journaux de l’époque vantent les bienfaits d’une multitude de médecines.
En fait, rien a changé, car aujourd’hui il en est toujours de même via les « publicités télévisées » ou internet.
Un seul but : vendre le plus possible et faire du profit !!!


Avis de naissances …..


13 janvier 1764

Enfant monstrueux d’une espèce fort rare
« Il est né le 3 de ce mois dans les enivrons de cette Ville, deux filles jumelles, dont une étoit sans tête, et par conséquent sans bouche, mais le plus singulier est qu’elle étoit aussi sans cœur, sans poumon, sans estomac, sans foye (sic) etc…. Elle a cependant vécu jusqu’au terme ordinaire de la grossesse et a pris un accroissement égal à celui de sa sœur.
M. Le cat, qui a donné à l’Académie la description de ce monstre, assure qu’il est unique en son espèce. Cet Académicien a expliqué comment ce fœtus a eu du sentiment et du mouvement sans tête, comment son sang circule sans cœur. A en juger par les conséquences raisonnées qu’il a tirées de ces irrégularités monstrueuses et des fonctions régulières dont elles ont néanmoins été capables ; elles répandent de grandes lumières, tant sur la formation que sur les usages des organes du fœtus ordinaire. Tout ce que nous en pouvons dire dans cette courte Annonce, c’est qu’une de ces conséquences devient une démonstration en faveur de la circulation du sang de la mère à l’enfant et de l’enfant à la mère ; que quelques modernes nient, et que d’autres s’efforcent de rendre douteuse.
Cet enfant-ci n’ayant ni cœur, ni aucun substitut de cette puissance motrice du sang, il a bien fallu que la masse de ses liqueurs reçût son mouvement de celui du sang de sa mère,  et que sa circulation fut une branche de celle de cette mère ; c’est ce que M. Le Cat a fait voir, en démontrant un abouchement direct de la veine ombilicale dans l’aorte de ce fœtus. »

Ma Doué ! Quel galimatias !!
Je suis bien heureuse de vivre au XXIème siècle…….
Ce « monstre » a-t-il vécu ? Si oui combien de temps ?  Rien dans le journal de Rouen les jours suivants. De plus ne sachant pas le lieu de naissance de ces jumelles, ni le nom des parents, difficile d’éplucher les actes baptistaires de ce début 1764, pour en savoir plus.
Je ne peux que le regretter.
D’ailleurs, y-a-t-il eu baptême ?


25 mai 1764

Au commencement du mois de Mars dernier, il est né au Puget, Diocèse de  Toulon, une fille qui a toute la face d’un Lièvre. Rien n’y manque, excepté les oreilles ; mais le derrière de la tête est semblable à celui de tous les autres enfans (sic). Tout le corps est très bien conformé. Elle est blanche et se porte bien ; mais son visage ou plutôt son masque qui ressemble en tout point à celui d’un lièvre, quand à la forme, aux traits, et même aux poils, fit suspendre pendant trois jours son baptême. Ce fut le chirurgien de Cuers, petite ville à une lieue de Paget, qui engagea le Curé à baptiser cet enfant. La mère, paysanne, âgée de 25 ans, a déclaré avoir eu une très forte envie de manger la tête crue d’un Lièvre que son mari avoit aporté (sic) au commencement de sa grossesse, mais qu’elle n’avoit jamais osé lui avouer cette fantaisie. Cette fille, malgré son museau de lièvre, tette (sic) fort bien et paroit d’une bonne constitution. Ce fait persuadera-t-il les Phisiciens (sic) du pouvoir de l’imagination des femmes enceintes sur leur fruit ?


Cette enfant était surement née avec une fente labio-palatine, plus communément appelée « bec de lièvre ».
La superstition étant la plus forte, cette anomalie passait pour être la cause d’une envie ou d’une frayeur de la maman lorsque celle-ci était enceinte, au même titre qu’une tache de vin…. Ou de fraises !
Aujourd’hui, un bébé sur mille est atteint de cette malformation, réparée lors d’une intervention chirurgicale.

Sentences de Police

3 février 1764

« La première condamne plusieurs particuliers en cinquante livres d’amende et à garder prison, pour avoir maltraité un autre particulier à neuf heures du soir ; fait défenses à toutes personnes de s’assembler tant de jour que de nuit avec des bâtons, sous peine d’être punis suivant les Ordonnances.
La seconde condamne aussi deux autres personnes en dix livres d’amende pour avoir fait du bruit et maltraité un particulier ; et un deux s’étant trouvé saisi d’un pistolet, le Siège l’a condamné en 3 livres d’amende, a confisqué le pistolet, qui a été vendu au profit des pauvres, lui fait défenses et à tous autres de porter des armes défendues, sous les peines portées par les déclarations du Roy de 1660 et 1728. »


10 février 1764

« La circonstance du carnaval a engagé le Juge de Dieppe à rendre ces jours derniers, une Ordonnance qui défend  à tous les habitants de quelqu’état qu’ils soient, de se masquer et déguiser pendant les jours gras. Une aussi sage défense mériterait d’avoir lieu par tout (sic) ; les abus qui se commettent ordinairement à la faveur du déguisement, en sont une preuve suffisante.»

Un pistolet confisqué et vendu au profit des pauvres ! Très bonne initiative.

Pas de déguisement pour le carnaval ! Dommage pour les honnêtes gens qui attendaient, sûrement avec impatience, ce petit moment de réjouissance.


Amateur de livres rares

24 février 1764

« On désirerait trouver à acheter le troisième volume de Molière, Edition d’Hollande 1750, ou de tout autre édition. »


En effet quatre volumes des œuvres de Molière ont été édités à Amsterdam entre 1749 et 1767, puis six autres dans la même période dont le sixième volume « contenait la vie de Molière ».
Quelques années avant, d’ailleurs, 1741/1744, une première édition de quatre volumes avait déjà eu lieu.

Molière : Jean Baptiste Poquelin, né à Paris le 15 janvier 1622 et décédé, dans cette même ville, le 17 février 1673.


Météo….

24 février 1764

« Depuis quelque-tems (ainsi dans le texte) nous avons été fort  maltraités par les grosses eaux. La Seine s’est accrue de façon que les quais, les maisons contigües et celles des rues voisines ont été remplies et à  une telle hauteur, que l’on alloit en bateau sur les quais ; grace (sans accent dans le texte) à la Providence nous sommes bien-tôt (ainsi dans le texte) débarrassés de ce fléau ; les eaux sont presque rentrées dans leur lit, et l’on travaille à netoyer (sic) et purifier les maisons qui ont souffert, avant de les habiter de nouveau, conformément à une Ordonnance de Police du 16 de ce mois, qui y assujettit les propriétaires. »


De nombreux articles de météorologie de l’année 1764 évoquent une Seine souvent prise par les glaces. Le dégèle entrainaient une hausse du niveau du fleuve et le débordement de celui-ci avec des conséquences toutes aussi importantes que désastreuses.
Maisons, mais aussi commerces implantées sur les quais, étaient dévastées par les eaux. Beaucoup de commerçants, lassés, finirent par aller planter boutique plus loin, au centre de la ville.
Les bateliers représentaient également une part importante des travailleurs du fleuve en relation directe avec l’activité portuaire de la ville.
Concernant les activités liées au fleuve, il existait, depuis 1765, un service de bains sur le fleuve, tenu par la compagnie des Eaux minérales de Saint-Paul
Les rives de la Seine étaient également un lieu de promenade et de nombreuses célébrations y avaient lieu en grandes pompes.
Pour éviter, en raison des inconvénients des inondations, que les berges de la Seine se voient désertées, des mesures officielles en cas d’inondations furent instaurées.


Centenaire

6 avril 1764

« En février dernier, la nommée Marie Bessin est morte à Nouainville, près Cherbourg, âgée de 105 ans, elle a conservé la mémoire et son bon sens jusqu’à la fin. »


Aucun acte dans les archives concernant la ville de Nouainville, avant 1792….  J’aurais pourtant aimé vous en dire plus sur Marie Bessin.

Si  réellement elle avait cet âge le jour de son décès, elle serait née en 1659.
Elle aurait donc vécu sous le règne intégral de Louis XIV, de 1640 à 1715.
Elle connut un nouveau roi, Louis XV, monté sur le trône le 1er septembre 1715.
Quelle fut sa vie ? Une vie de misère, de famine, de lutte pour la survie ?
A combien d’épidémies a-t-elle survécu, quand on sait qu’une simple épidémie de grippe, de rougeole, de scarlatine décimait tout un village, sans oublier la tuberculose qui faisait beaucoup de victimes ?
Bien que je ne puisse pas dire grand-chose sur cette femme, assurément, si elle a bien vécu 105 ans, sa vie ne fut sans doute qu’une succession de deuils ; mais a cette époque la mort était « naturelle », on enterrait ses morts et voilà tout, que pouvait-on faire d’autre ?

Un petit aperçu  des hivers particulièrement rudes :
1659 – 1660 et 1661 (Rhône et Seine gelé pendant plusieurs mois) – 1663 – 1667 – 1670 (froid horrible accompagne d’une épidémie de peste) – 1677 – 1683 (neige abondante ce qui provoqua de fortes inondations à la fonte des neiges) – 1684 et 1689 ( le thermomètre est descendu à – 16 à Paris) – 1692 (année désastreuse entre froid intense et pluies diluviennes) – 1694 et 1695 (neiges abondantes et puis inondations)………. La suite est identique …… froid intense, inondations…..

Un autre des étés caniculaires :
1662 – 1666 - 1669 – 1676 – 1681 – 1703 (en février grandes chaleurs dans le nord de la France)…….

J’arrête là cette énumération car elle est récurrente au fil des années. Ce que je peux affirmer c’est que vivant du fruit de leurs récoltes, tous les mouvements d’humeur des intempéries (qui sont encore d’actualité au XXIème siècle) n’apportaient que famine et maladies……


Incendies

25 mai1764


« Lundi 21 de ce mois, il y a eu à Evreux, au centre de la ville, un terrible incendie, deux grandes maisons ont été entièrement détruites, et les deux voisines très endommagées, la perte se monte à plus de 15 000 livres. Le feu a pris sur les 10 heures du matin, chez un boulanger, qui avait eu l’imprudence de mettre du foin dans un apartement (sic) sur son four ; ce funeste accident est une leçon pour tous les Boulangers, et pour leurs voisins.
Quelques ouvriers ont été blessés, mais personne n’a heureusement perdu la vie. Tout le monde s’est empressé de secourir les incendiés ; les PP. Capucins et Cordeliers y ont travaillé avec le plus grand zèle, les uns en sauvant les meubles de la voracité des flammes ? les autres en tâchant de les éteindre. »


Les capucins vinrent s’installer à Evreux en 1613 à la demande de l’évêque Jacques Davy du Perron. Le couvent des capucins, construit en 1620, devint, après la révolution, en 1791, une prison, puis une école centrale, une école communale, un collège et enfin un lycée en 1857. Pendant la Première Guerre Mondiale, il se transforma en hôpital militaire. Redevenu collège en 1956, il abrite aujourd'hui l’Ecole Nationale de musique d’Evreux.
Le cloître conserve encore aujourd’hui tout son caractère authentique avec ses tableaux peints ornés de sentences.

Les Cordeliers, nom prit par les Franciscain, lors de leur établissement en France qui remontait à  Saint-Louis.
Cette appellation vient du fait que ces religieux portaient sur leur bure une grosse corde, nouée à intervalles réguliers, soit selon leur expression « corde liée », d’où la déformation « cordeliers ».
Avant la Révolution,  les Cordeliers possédaient en France 284 couvents, qui furent tous fermés en 1790.
Cet ordre a donné son nom au « club des cordeliers », car ses membres se réunissaient pour donner séance dans la chapelle du couvent des cordeliers de Paris.

17 août 1764


« Le 8 de ce mois, le feu a pris à Hirville, à une lieue et demie d’Evreux, les bâtimens (ainsi dans le texte) de la ferme et partie du Presbitère (sic) ont été brûlés ; deux enfants ont malheureusement péri dans les flammes, et sans le bruit d’un fusil que le feu fit partir, et dont le bruit réveilla le Fermier et ses gens, aucun n’auroit échappé. »

Ce tragique évènement s’est passé dans la commune de Irreville dans l’Eure.
La ferme appartenait à Louis Dupont qui l’exploitait en famille avec son fil Mauxe Vénérand  Dupont, et son gendre, Nicolas Le Sauvage.
Dans cet incendie il perdit deux de ses petits-enfants :
Marie Catherine âgée d’environ trois ans, fille de Mauxe Vénérand, son fils et de Marie Geneviève Legrand, sa belle-fille.
Louis Le Sauvage, âgé d’environ quatre ans,  fils de sa fille Barbe Dupont qui avait épousé Nicolas Le sauvage.

Je ne peux rien dire de plus sur cette famille, les éléments ci-dessus viennent des deux actes d’inhumation. Sans vouloir entrer dans des détails morbides,  les deux petits corps ont été retrouvés carbonisés, l’acte parlant de «cendres ».


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« Le 9, le feu prit aussi à l’Eglise de la Chartreuse de Gaillon, par la faute des Plombiers, et fit des progrès si rapides, qu’elle a été entièrement consumée : on estime le dommage à près de quatre cens (sic) mille livres. » 


En 1563, Monseigneur de Bourbon fonda  cette chartreuse dans la plaine d’Aubevoye, en complément logique de son palais. Détruite par un violent incendie en 1764, elle fut reconstruite et vécut en tant que monastère de l’ordre des Chartreux jusqu’en 1790. Vendue en 1834 à un fermier, elle fut alors démolie. L’affiche de cette vente portait la mention : « Ce domaine est des plus beaux de France »
(Source site de la ville de Gaillon)



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