« Que s’est-il passé ? pensait maman.
Dans sa cuisine, elle épluchait les légumes pour la
soupe du soir. La maison était calme, mais ne l’était-elle pas depuis plusieurs
semaines ? Dans le salon, maladroitement, Justin travaillait son piano.
Chaque fausse note ne lui arrachait plus aucun cri de colère. Il s’appliquait.
Maman, heureuse du changement de comportement de son
rejeton, faisait des vœux pour que cette tranquillité dure le plus longtemps
possible, tout en n’y croyant pas réellement.
Les précédentes accalmies avaient été si éphémères.
Même en classe, l’attitude de Justin s’était
améliorée. Il s’intéressait et participait aux activités.
Plus de cris sauvages, plus de révoltes… le
bonheur !!
Que pouvait faire à présent notre
Haut-Délégué-chargé-de-missions-délicates-auprès-des-enfants-difficiles ?
Plus rien ! Il avait achevé sa mission.
Cette nuit-là, dormant d’un sommeil paisible, Justin
rêva. Il ne rêva pas d’une multitude de petites souris affairées à des tâches
nombreuses et essentielles, non, il rêva d’une petite souris, une seule, son
ami le Haut-Délégué-chargé-de-missions-délicates-auprès-des-enfants-difficiles.
Il avait revêtu une redingote d’un style vieillot, d’un autre siècle. Sur sa
tête trônait un chapeau haut-de-forme un peu usagé, et sur son nez, toujours en
place, les lorgnons, ustensile très important, en raison de sa vue un peu
basse. Ce curieux personnage n’était-il pas très âgé ?
Il portait à la main un sac de voyage.
« Je suis
venu te dire adieu, lui disait-il. Tu n’as plus
besoin de moi à présent. J’ai reçu un autre ordre de mission et je dois
partir. Demain, à ton réveil, tu m’auras oublié, mais je sais que mon
enseignement restera en toi et que tu le poursuivras. Grandis bien. Je penserai
toujours à toi. N’oublie surtout pas que seules ta curiosité et ta ténacité à
apprendre t’apporteront une immense culture. Toi seul possède les atouts pour
avancer dans la vie. Bonne chance !
Pendant que Justin faisait ce rêve, Papa et Maman
étaient venus le border et l’embrasser avant d’aller dormir. Ils regardaient
tous deux leur enfant, le sourire aux lèvres.
Comme ils l’aimaient ! Comme ils étaient fiers de
lui !
Maman se rappela soudain les crises de son bambin, ses
colères. Elle se souvint aussi qu’elle
répondait à qui lui demandait le nom de son fils :
« Justin », en ajoutant à mi-voix : « Just’un… oui et
heureusement qu’il n’y en a pas deux !! … »
Que cela lui semblait loin à présent, oublié …. !
Et devant ce visage d’ange aux paupières closes,
devant le sommeil paisible de l’enfant, elle s’entendit déclarer à Papa :
« Il serait peut-être temps de lui donner une
petite sœur… »
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