mercredi 20 janvier 2016

1769 – VOULEZ-VOUS LA SUITE ?






Bon pied, mais malheureusement, pas bon œil !

24 mars 1769

« Marguerite Couté, veuve de Richard Martin, a actuellement 114 ans & 7 mois, étant née le 4 ou 5 Août 1654 ; elle jouit de son bon sens, & sa mémoire est assez heureuse, mais elle est privée de la vue depuis trois années & sa santé est chancelante. Elle demeure avec sa fille & son Gendre, vis-à-vis le jardin des Mathurins, au haut de la rue des Flandres ; sa fille lui rend avec une amitié vraiment filiale, les devoirs continuels qu’un si grand âge exige, & son Gendre fait tous ses efforts pour soutenir par un travail assidu & prolongé, les jours de sa belle-mere (sic) & de sa femme. »


Une belle vie apparemment, qui devait prendre fin quelques mois plus tard, car ……


30 juin 1769

« Marguerite Coutté, dont nous avons fait mention dans la feuille du 24 Mars dernier, est décédée le 18 du présent mois de Juin, à 7 heures du soir ; elle étoit née à S. Jean de-Folleville en Caux le 4 ou 5 Août 1654 ; elle a conséquemment vécu 114 ans 10 mois et 14 jours, & passé cette longue vie dans l’état d’indigence. Elle fut en service jusqu’à l’âge de 40 ans, qu’elle épousa Richard martin, journalier, & travailla ensuite à journée pour gagner sa vie. Elle eut un fils à l’âge de 45 ans, & une fille à 50 ans 4 mois : cette fille est constamment (sic) née à Radicatel le 16 Décembre 1704 ; elle perdit son mari vers 1710, & a toujours été très-laborieuse (sic), s’est occupée d’ouvrages forts, & a été fatiguée par des maladies nombreuses et violentes, telles que des pleurésies, fluxions de poitrine & hémorragies : elle a été pendant 23 ans à la charge de sa fille & de son gendre, ouvrier Toilier, demeurant à Rouen, paroisse S. Nicaise, où elle est décédée. Sa vue s’étoit affaiblie peu à peu ; mais elle n’en a été privée totalement que pendant quatre ans ; elle n’a été réduite à garder le lit que depuis le carnaval de 1767. Dans les derniers tems (sic) elle ressentoit des douleurs dans la tête & les membres, mais elle jouissoit de tout son bon sens & avoit la mémoire assez heureuse & l’ouie (sic)  fort bonne ; elle a enfin succombé dans une maladie de poitrine à laquelle elle a résisté pendant près de deux mois.
Il ne nous a pas été possible de vérifier son grand âge. M. le Curé de Folleville atteste qu’il a cherché inutilement dans les registres dont il est dépositaire & dans ceux qui sont au Greffe du Bailliage ; mais on tient de M. le Curé de S. Nicolas-de-la-Taille, village voisin, qu’un homme de sa paroisse, inscrit le premier sur les plus anciens registres des baptêmes qui sont en sa possession, & mort, il y a plusieurs années, âgé de 99 ans accomplis, lui avoit dit avoir bien connu cette femme, & qu’elle étoit déjà (sic) vieillotte lorsqu’il étoit encore jeune.
M. le Curé a donné des marques de vénération pour ce grand âge, en lui faisant une inhumation distinguée du rang des pauvres. »

Saint-Jean-de-Folleville : commune française de Seine Maritime.

Je n’ai pas eu plus de chance que Monsieur le Curé de Folleville, car je n’ai pas non plus trouvé l’acte de naissance de Marguerite.

J’ai, par contre, trouvé celui de sa fille

Radicatel – 16 décembre 1704
« Le seizième jour de décembre a été baptisé marguerite née le meme jour du legitime mariage de Richard martin et de marguerite Coute le parrain Thomas Coute la marraine marie martin. »

Et, bien évidemment l’acte d’inhumation de cette centenaire :
Rouen – Paroisse Saint Nicaise
« Le lundi 19 juin 1769 a été inhumé dans le petit cimetière par Monsieur Osmont prêtre Curé de cette paroisse le corps de marguerite Coutey veuve de Richard Martin décédé hier munie des sacrements de l’Eglise agee de cent quinze ans présence de son gendre et de plusieurs voisins »
Les signatures : Adrien Duperron – J Ch Benard

Si je n’ai pu retrouver la rue des Flandres, je peux affirmer que, dépendant de la paroisse St Nicaise, le domicile de la fille de cette centenaire se situait dans une rue donnant derrière l’abbaye de Saint-Ouen.


Mal aux dents !

30 juin 1769

« On mande de Marcksugenheim, dans la Franconie, que la nommée Binberg, veuve d’un Relieur de ce nom, âgée de 90 ans, a été malade à la mort, il y a environ trois mois, & qu’elle a été abandonnée des Médecins ; mais ce n’étoit que l’éruption de six dents maxillaires qui servoit de crise à cette maladie qui étoit une véritable dentition difficile. Depuis cet évènement, il s’est encore présenté cinq autres dents, de façon que cette personne a actuellement onze nouvelles dents. »

Bien curieux, des dents qui poussent alors que la personne à 90 ans !
Cette personne avait, assurément, pas « une » mais «plusieurs dents contre quelqu’un » !

Naissance et mort de quadruplets

5 mai 1769

On mande de Leon en Basse Bretagne, que Jeanne Normand, âgée d’environ 40 ans, de la paroisse de Peoudaeniel, évêché de Leon, est accouchée le 5 avril de trois filles & d’un garçon, qui furent baptisés le même jour à l’Eglise de la Trève. Deux de ces enfans (sic) moururent du 6 au 7, & les deux autres le 8.


Plusieurs mentions de cet évènement avec des dates de naissance différentes (dix jours plus tard).
Yves Legoff était du manoir de Kergreach en la Trève de Trencaouenzan.
Je me replonge dans mes recherches pour avoir, si possible, plus d’informations.
Je me suis replongée et j’ai failli me noyer !!
Les actes de Ploudaniel ne sont pas en ligne, aussi : « Chou blanc ! »


Que d’intempéries !

25 août 1769

Le Samedi 29 Juillet 1769, il s’est formé sur le territoire d’Arbois, & à un quart de lieue entre le sud et l’ouest, un ouragan, dont les effets ont été d’autant plus effrayans (sic) qu’ils arrivent rarement en cette ville. Dans moins de cinq minutes, il a déraciné de fond en comble, rompu ou maillé quantité de gros arbres, surtout de gros noyers, depuis la côte de Courcelles, en s’étendant par le fauxbourg (sic)  de Changin au communal de la Noiresse, à S. Roch, à Verreux, pour s’évanouir avec grand bruit au mont de Mesnay et au Vernoy, c’est-à-dire, qu’il a parcouru au moins une lieue sur la largeur d’une portée de carabine. Les toiles qui étoient au blanchissage de la Noiresse voltigèrent tout à coup au gré de la tempête. On en a retrouvé dans la rivière, les vignes voisines & à plus de 200 toises. Cet évènement imprévu étoit aux yeux des connoisseurs  (sic) comme l’image d’un volcan, qui sembloit vomir de noires fumées dans de violens (sic) tourbillons bizarrement nuancés, qui, disparoissant & se reproduisant d’un instant à l’autre, étoient toujours précédés & suivis de mugissemens (sic) épouvantables. Le couvert d’une maison de Mesnay a été emporté à 50 pas. Quelques fonds remplis de chanvres & de bleds (sic) de Turquie, des vignes même ont été fort endommagés. On évalue la perte des noix à plus de 4000 francs. Le tronc d’un noyer rompu s’est trouvé avoir près de 10 pieds de tour. Les jeunes arbres n’ont résisté qu’à cause de leur souplesse.
Pendant l’ouragan, une personne avantageusement placée par hazard (sic) à la descente de Pupillin, voyoit sans crainte ni danger comme sur une surface plane, ce spectacle effrayant, qui, par sa position, devenoit en quelque maniére (sic) parallele (sic) à ses yeux & méritoit être contemplé. Il lui survint l’idée de la fameuse Troye réduite en cendres, & elle en vit une espéce (sic) d’esquisse naturelle & physique, qui bientôt disparut comme un songe.

Je n’ai pas découverts d’autres articles concernant ce ravage météorologique.
Je vous situe simplement ci-dessous, avec plus de précisions, les communes où cela s’est produit.
Mesnay et Pupillin, commune, du Jura en Franche-Comté.
Vernoy, commune du département de l’Yonne, en Bourgogne.
Le château de Verreux est situé en Arbois, dans le Jura.


15 septembre 1769

On apprend de Feltri dans la Marche Trevisane, que le tonnerre étant tombé dans la salle des spectacles, pendant qu’on y représentoit une Comédie & qu’il y avoit plus de 600 personnes, & précisément au milieu du Théâtre, y éteignit toutes les lumières, tua 6 personnes, en blessa dangereusement environ 70 autres, & jetta (sic) toute l’assemblée dans la terreur.  Une dame fut blessée à l’épaule, & eut en même-tems (sic) ses cheveux brûlés, & tout l’or qu’elle avoit se trouva fondu ; nombre d’autres personnes eurent leurs souliers réduits en cendres, & des femmes leurs boucles d’oreilles consumées ; le fond du théâtre par où le tonnerre entra, fut tellement endommagé, qu’il menace ruine. Quatre chirurgiens qu’il y avoit dans la Ville, n’ont pas suffi pour panser les blessés, & pour saigner ceux que la frayeur n’avoit fait que saisir ; il a fallu en faire venir des endroits circonvoisins.

Marche Trévisane, ancienne région historique d’Italie, désignait aujourd’hui sous le nom de Province de Trévise.

Feltre, commune de la province de Belluno dans la région Vénétie en Italie.

Mon dieu, mais ce fut l’enfer pour que les bijoux fondent !


22 septembre 1769

Les esprits étoient encore frapés (sic) du malheur arrivé au théâtre de Feltri, lorsqu’un malheur beaucoup plus terrible vint répandre l’horreur & la consternation dans cette contrée. Bresse, Capitale d’une des Provinces de la Lombardie Vénitienne, que les Italiens nomment la Ville armée, a été frappée de la foudre le 18 Août dernier, à sept heures & demie du soir. Elle tomba sur un magasin dans lequel il y avoit alors une immense provision de poudre qui devoit être envoyée à Venise. Cette poudre s’enflamma, & son explosion renversa de fond en comble la sixième partie de la ville. Trois mille personnes ont été ensevelies sous les débris ; une tour de grosses pierres qui s’élevoit au-dessus du magasin, sauta toute entiére en l’air, & répandit une grêle de pierres qui enfonça ou renversa les maisons, les églises & les palais ; plusieurs pierres de cette tour lancées en ligne droite, découvrirent les toits, percèrent les murailles & fracassèrent tout. Une d’entr’elles (sic), portée à une demi-lieue de distance, après avoir foudroyé tout ce qui s’oposoit (sic) à son impétuosité, tomba sur une maison qu’elle a écrasée, & où elle tua cinq personnes. Le jour ne parut que pour offrir aux yeux le plus affreux de tous les spectacles ; les chemins & les rues couverts de ruine, la campagne toute brûlée, sur-tout (sic) du côté du bastion, des arbres déracinés & coupés en morceaux, & la terre jonchée de cadavres d’un grand nombre de pauvres Paysans. Ce coups (sic) a été si violent, qu’il a courbé les plus gros véroux (sic) jusqu’à la distance de 18 milles, transporté des pierres jusqu’à celle de 10 milles, & une pièce de canon à près de 3 milles. On a trouvé presque toutes les boutiques de la ville ouvertes ; les portes ont été enlevés en l’air & réduites en cendres. On évalue le dommage connu à 4 millions de Philippes. 2000 personnes ont été envoyées par le Gouvernement pour creuser les débris, & où les hommes à demi-morts poussent des cris lamentables & implorent
un secours qu’il est presqu’impossible de leur donner.

Quel feu d’artifice qui s’achevé en cataclysme !
Deux mille personnes ont fouillé les décombres afin de secourir les personnes ensevelies.
Nous connaitrons peut-être dans un prochain article le nombre exact des victimes.


13 octobre 1769

On mande d’Amiens que le 20 d’Août dernier, à six heures du matin, le tems (sic) étant un peu orageux, le nommé Lombard & sa femme, occupés à la moisson aux environs du village de Rumigny, suivoient, à quelques distance, une voiture qu’ils avoient fait charger de grains, & qui étoit attelée de quatre chevaux, lorsque le Charretier, sans voir d’éclair & sans entendre aucun bruit de tonnerre, se sentit renverser par terre ; revenu de l’effroi qui lui avoit causé cette chûte (sic) violente, il vit ses quatre chevaux renversés & morts, & aperçut à terre, près de la voiture, un trou fumant, d’où la foudre étant sortie, alla tuer à cent pas de là le nommé Lombard & sa femme, éloignés l’une  l’autre de vingt pas,  dispersa un monceau d’avoine, & à cent pas plus loin renversa le père (sic) du nommé Lombard, de la même manière qu’elle avoit renversé le Charretier. Ce vieillard étant revenu à lui, voulut se relever ; mais il se trouva incapable de faire usage de ses jambes ; il se traîna, à l’aide de ses mains, jusqu’à l’endroit où étoient son fils et sa bru qu’il trouva morts. Les Chirurgiens firent la visite des corps, & n’y aperçurent aucune blessure, non plus qu’aux pauvres chevaux, mais seulement un gonflement considérable & une grande difformité dans les traits. La femme, qui étoit jeune & jolie, se trouva hideuse ; tout son corps, ainsi que celui de son mari, étoit absolument jaune. Les quatre chevaux avoient les intestins hors du corps. Tous étoient renversés du même côté. Le chapeau de l’homme étoit percé & ses cheveux brûlés ; mais il n’avoit aucune contusion de la tête.

Avec une immense patience et beaucoup de ténacité, j’ai consulté tous les actes d’inhumation de 1769 de toutes les paroisses des communes dans un large périmètre autour de Rumigny. Même ceux d’Amiens.
Mais, hélas, je n’ai pu rien découvert sur ce double décès. J’en suis toute attristée….. Vous révéler le nom de ce malheureux couple, aurait été manière de  lui rendre un dernier hommage.


13 octobre 1769

On mande de Stockolm, en date du 5 du mois dernier, que le Prince Royal allant dans une voiture ouverte, de sa Maison de Carlberg à celle d’Eckholmsund, fut surpris par un violent orage, accompagné de tonnerre. Le foudre passa dans la voiture entre son altesse Royale & deux Chambellans qui étoient sur le devant, & tomba à côté d’eux. Le Prince ressentit une commotion très-violente (sic), & fut sur le point d’être suffoqué ; mais il reprit bientôt son état naturel, & cet accident n’a eu aucune suite.

Oh, le prince a eu bien chaud ! Mais, rassurez-vous, il a repris très vite « son état naturel » !

Le prince dont il est question est sûrement  Gustave de Suède, né le 24 janvier 1746, fils de
Adolphe Frédéric de Suède et Louise Ulrike de Prusse.
Il avait épousé, le 4 novembre 1766 à Stockholm, la princesse Sophie Madeleine de Danemark.
De cette union naquit :
·       Gustave 1778 – 1837
·       Charles Gustave 1782 – 1783

Il accéda au Trône de Suède au décès de son père, le 12 février 1771. Il régna jusqu’à sa mort, le 29 mars 1792, date à laquelle il fut assassiné à Stockholm. Son fils Gustave lui succéda au pouvoir, alors qu’il n’était âgé que de treize ans. Son oncle paternel assura la régence jusqu’à sa majorité.


Les intempéries étaient fréquentes, je devrais dire, ont toujours été fréquentes. On vivait avec. Et après la tourmente, on relevait les manches et on reconstruisait…..
Dans la France de cette époque, malheureusement, beaucoup travaillaient la terre et vivaient des récoltes. Voilà pourquoi, il y a eu autant de famines à travers les siècles !


Au loup !

13 octobre 1769

Une Lettre de Plaisance, dans le Duché de Tarbes, porte que les premiers jours de Septembre dernier, un Paysan venant des champs à la ville sur le soir, & portant le plus jeune de ses fils, vit venir à lui à toutes jambes un loup de la plus grande taille : ne pouvant l’éviter par la fuite, & craignant tout pour son fils, il se mit en défense & à crier de toutes ses forces au secours ; ses cris attirèrent aussi-tôt (sic) vers lui plusieurs paysans qui suivoient la même route ; l’un d’eux voyant l’animal près de cet homme, accourt de toutes ses forces, arrive dans le tems (sic) que le loup alloit se jetter (sic) sur lui, le saisit au cou, le mit entre ses jambes & le serra de toutes ses forces. Aussi-tôt (sic) il dit à l’enfant de prendre le couteau de son père (sic), qui étoit encore transi de peur, & de percer l’animal à la gorge, ce qu’il fit à plusieurs reprises, & les spectateurs eurent bientôt le plaisir de voir périr ce terrible animal ; il fut ensuite porté à la ville, où ce nouveau Samson reçut mille louanges.

J’imagine très bien cet effroyable corps à corps loup-homme.

Et voilà un bien brave petit bonhomme qui n’a pas hésité à tuer cette terrible bête..

Comment se nommait-il ? Je ne sais, car comme je vous l’ai déjà dit, sans événement daté, que ce soit naissance, mariage ou décès et de leurs actes paroissiaux, tout comme sans lieu défini, je ne peux m’appuyer sur rien d’autres pour recréer l’histoire. Heureusement, il y a les articles de journaux, mais ils n’apportent pas toujours les précisions nécessaires.


Au feu !

17 novembre 1769

On mande d‘Alençon, que le 28 du mois dernier, le feu prit à la Prison royale, dans la chambre des femmes, & fit de rapides progrès ; mais par les soins de M. le lieutenant-Général, le Procureur du Roi, le Subdélégué, le Maire de la Ville, le Lieutenant de la Maréchaussée, & autres qui travaillèrent & encouragèrent chacun à faire de même, on vint à bout d’éteindre le feu : une femme enfermée pour aliénation d’esprit, a péri dans les flammes. Il est malheureux qu’il n’y ait pas dans ladite ville une ou deux pompes telles qu’en fabrique le sieur Thillaye, le peuple n’auroit pas grand-chose à craindre, puisqu’avec ces utiles machines, il n’est presque pas possible que le feu fasse de grand dégâts. On dit que M. de la Boderie, Maire de la Ville, dont le zèle patriotique est connu, va travailler aux moyens de s’en procurer.


Une pauvre femme, enfermée pour aliénation, a péri.
Qui était cette femme ? Pourquoi se trouvait-elle là, en prison, plutôt que dans un hospice ?
A vrai dire, elle était assurément mieux en prison que dans un asile, aux mains de médecins qui ne connaissant rien en psychiatrie, imposaient des traitements barbares aux malades.

Un vrai travail de petite fourmi, pendant des heures et des heures, et voilà….
Dans sa cellule d’isolement, Anne Than décéda le 27 octobre 1769. Personne ne répondit à ses cris.  Pensez donc une « folle » !

Alençon – Paroisse de Notre Dame
« Le Dimanche vingt neuf octobre 1769, par nous vicaire soussigné acte inhumé dans le cimetière de cette église le corps de Anne Tan agée de vingt cinquante ans veuve de Louis Binet careleur décédée d’hier dans la prison royale de cette ville furent présents maitre françois georges Lemaire prestre et pierre joseph Guillard »
Signature du prêtre : p f Gautier

L’âge de cette femme est curieux, mais je pense qu’il s’agit d’une erreur, car « cinquante »  a été noté en marge de l’acte. Le prêtre a évidemment omis de barrer le « vingt ».
D’ailleurs « cinquante ans » est plus plausible, car Anne Than mit au monde une fille  le 1er novembre 1758. Cette petite, prénommée Charlotte Anne, reçut les sacrements du baptême le lendemain, jeudi 2 novembre, dans l’église de la paroisse Notre-Dame à Alençon. Son père Charles Louis Binet était toujours carreleur. Il lui fut choisi Jean Rondeau pour parrain et Charlotte Marais pour marraine.

Si l’on prend le peu d’éléments en notre possession :
1758  -  Naissance de Charlotte
1769  - décès de Anne, sa mère, veuve à cette date

Cela veut dire que Anne Than, si elle était  bien âgée de 50 ans au moment de son décès en 1769, avait 39 ans lors de la naissance de sa petite Charlotte.
On peut donc penser qu’il s’agissait d’un second mariage pour Charles Louis Binet, et que le marié était beaucoup plus âgé que son épouse, voilà sans doute pourquoi Anne Tan est dévenue rapidement « veuve Binet ».
Une autre hypothèse remariage pour les deux époux.
Dans les deux cas, la mort de Charles Louis Binet est survenue rapidement après le mariage, et il est fort probable qu’il était plus âgé que son épouse.

Sans vous affirmer quoique ce soit, j’ai découvert le décès d’un  Charles Binet, survenu le 27 janvier 1762. Laboureur, âgé d’environ 63 ans et époux d’Anne ….. (nom illisible). Je ne peux que penser, sans aucune affirmation toutefois, que c’est bien là l’époux d’Anne Than.

Difficile pour une femme seule d’élever un enfant…..  je suppose que la vie n’a pas été aisée pour elle ! Alors, dans ce cas, on tenait un peu jusqu’à épuisement des forces morales et physiques et puis, c’était souvent la dérive ….. jusqu’à la folie…

En 1769, Anne Tan était emprisonnée, mais depuis combien de temps ? Rien pour le dire. Rien non plus sur les raisons de cette incarcération, sauf l’aliénation.
La prison, même à cette époque n’était que provisoire en cas d’aliénation. Elle survenait si le malade perturbait la vie de ses voisins ou s’adonnait à des faits extravagants, dérangeants sur la voie publique. Il était alors souvent dirigé vers un asile ou hospice, en fonction des places disponibles.
Considérant ce qui précède,  on peut en déduire que cette femme n’était pas dans la prison d’Alençon depuis bien longtemps.

Comment et où  a vécu la petite Charlotte depuis l’incarcération de sa mère ? Chez son parrain ? Chez sa marraine ? Chez une voisine charitable ? Dans un orphelinat ?
Là non plus je n’ai pas de réponse. Désolée !

Mais ? j’ai retrouvé la « petite Charlotte », le jour de son mariage, toujours dans la paroisse de Notre Dame d’Alençon, au bras de André Autheman, le mardi vingt cinq juin 1782.

Il est noté sur l’acte, concernant les époux :
« ….. André Autheman charpentier fils majeur de pierre autheman et de anne peïre……Charlotte Binet fille majeure des defunts charles Binet et de anne Than …… »

La mariée née en 1758 à peine 24 ans.
Le marié, né à Arles, le 27 janvier 1755, avait 27 ans. Cela faisait un an qu’il habitait  Alençon, avec ses parents. (mention sur l’acte de mariage)

Quand partirent-ils habiter Arles ? Je ne peux le dire précisément, mais assurément après  janvier 1785,  comme l’atteste la naissance de :
·       Jeanne Sophie le 14 Juillet 1783 à Alençon
·       Anne Célestine le 8 janvier 1785 à Alençon

André décéda dans sa ville natale,  le 1 juillet 1827.
Anne Célestine, la seconde fille du couple,  mourut en 1832 à Arles, également.
Charlotte y décéda aussi le 15 novembre 1833.

Une petite chose encore si vous le permettez.
Bien que l’article ne parle que d’une victime, je vous laisse découvrir ce qui suit :

Acte d’inhumation – Alençon Hôtel Dieu – Mois de Novembre 1769

« Le samedy quatre octobre 1769 par nous soussignés prêtre prieur de l’Hotel Dieu a été transporté et inhumé dans le cimetière de St Leonard le corps de Jacques ainault charpentier age de trente huit ans décédé hier muni des sacrements de pénitence et d’extreme onction. »

Le prêtre devait être très ému, car il ne s’agissait pas du 4 octobre mais bien du quatre novembre, pour preuve, cette mention en marge de l’article :
« il tomba dans les flammes dans la prison se livrant avec un grand zele à éteindre le feu. »

Brûlé grièvement, Jacques Ainault succomba à ses blessures quelques jours plus tard.

Voilà ce que je peux vous apprendre, mais à partir des quelques lignes de ce petit article, il y aurait de belles pages à écrire !
Vous comprenez, maintenant, je suppose,  pourquoi je suis si passionnée ?



Le tribunal a jugé et condamné.

27 octobre 1769

Chambre des vacations
Du 3 Novembre 1769. Arrêt, qui condamne le nommé Jean-Baptiste Filleul, Meunier, aux Galères pour trois ans, & préalablement marqué des lettres G.A.L., pour différens (sic) excès de prévarications.
Du 6 du même mois. Autre arrêt, qui condamne le nommé Jean le Roi à être pendu pour avoir été trouvé saisi & vendant des effets volés dans l’Eglise de S. Gervais-les-Rouen ; deux de ses complices ont été effigiés.

On ne badinait pas avec les lois. Le présumé coupable, aussitôt arrêté, était jugé et la sentence vivement expédiée…
Jean Baptiste Filleul, meunier. Vous savez combien de personnes en France porte ce nom ? Une multitude !
De plus en 1769, le métier de meunier n’était pas rare.
Une petite précision. Le meunier avait mauvaise réputation. On le soupçonnait de détourner quelques sacs de blé à son profit.
Je ne voudrais pas froisser les meuniers par cette remarque, car il était dit de même pour les tailleurs qui eux étaient accusés de se servir largement sur le tissu de sa clientèle.

Quant à Jean le Roy, il volait dans les églises. Quel sacrilège !
Il était évident que dans ce cas, la peine ne pouvait être que capitale.
Pas d’acte d’inhumation non plus, l’Eglise ayant sûrement refusé de le recevoir pour une dernière prière. Pensez-donc, même mort, n’aurait-il pas encore dérobé quelques reliques !
Qui étaient ses complices ? Je n’en ai pas la moindre idée.
Ils ont été effigiés, c'est-à-dire, exécuté en effigie, dans un simulacre de peine ou supplice.

Aujourd’hui on dirait, concernant les accusés en fuite, donc non présent à leur procès, qu’ils sont condamnés par contumace.

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