jeudi 13 octobre 2016

1779 - QUE NOUS RÉSERVE CETTE ANNÉE ?



Centenaire

12 janvier 1779

« Le 5 janvier, veille du jour des Rois, est mort à Bayeux Gabriel Lefevre, âgé de 108 ans, 3 mois & 14 jours, étant né le 21 septembre 1670. Nous ne répéterons pas ce que nous avons dit de ce respectable vieillard dans nos annonces de l’année 1776 n° 33, nous ajouterons seulement qu’il avoit servi dans l’infanterie & dans la cavalerie, pendant toute la guerre de la succession d’Espagne. Il a conservé, avec de grands sentiments de religion, une santé robuste & toute sa gaieté jusqu’à la fin ; & la présence d’esprit n’a disparu chez lui qu’avec la vie. »

Comme je le notais déjà dans un de mes articles de 1776, ce « vénérable vieillard » était bien né dans l’Orne à Durcet, le 21 septembre 1670. Je n’étais, toutefois, pas tout à fait sure de l’orthographe du nom de sa mère ni de celui de sa marraine.
Le vingt deux jour de septembre a été baptizé gabriel Le febvre né le jour precedent fils de louis et de jeanne Coulonche son parain gabriel Le febvre sa maraine anne  Houillourt.

Je déplorais de n’avoir pu trouver la date de son décès, et bien voilà, c’est fait : 4 janvier 1779. Et il me fallut une bonne dose de courage et de patience pour affronter, une à une, toutes les paroisses de Bayeux, afin de dénicher le document, prouvant son décès. J’ai bien failli abandonner. Cela aurait été dommage, si près du but !

Voici donc son acte d’inhumation établi à Bayeux – Paroisse Saint-Patrice :
Le mardi cinquieme jour de janvier mil sept cent soixante et dix neuf a été par nous curé de St Patrice inhume dans le cimetiere dudit lieu le corps de Gabriel lefêvre Bourgeois de Bayeux Demeurant en notre paroisse lequel age de cent huit ans trois mois douze jours decede hier muni des sacremens. Ladite inhumation faite presence de Messire Philippe le Brecque vicaire, françois liegard toillier et de richard piperel bedeau tous de notre paroisse, lesquels ont  signé avec nous.

Rien dans cet acte ne peut aider à reconstituer  sa vie familiale. Aucun nom d’épouse et aucune personne portant son nom sur l’acte pouvant, éventuellement faire penser qu’il avait eu des enfants.
Il avait été soldat. Sans doute pendant un bon laps de temps.
La mention « bourgeois de Bayeux », laisse à penser qu’il vivait dans une certaine aisance.



Remède qui aurait été efficace

30 avril 1779

« Tout le monde connoit les ravages de la petite vérole ; une personne respectable a publié depuis peu un moyen bien simple de s’en préserver : il faut après la section du cordon ombilical, que la sage femme la saisisse d’une main dans la partie attachée au ventre de l’enfant, & que de l’autre, après avoir fait la section, elle exprime toutes les liqueurs contenues dans cette partie excédente (sic), pour s’en assurer, on laissera sortir quelques goutes (sic) de sang, ensuite on fera la ligature : on pratique cette méthode en plusieurs endroits, ils ont été exempts de cette maladie. »

Puis-je émettre quelques doutes ?


Incendie à Pont-de-l’Arche

11 juin 1779

« Le nuit du 26 au 27 mai, il y a eu un incendie considérable dans le fauxbourg (sic) des champs de la ville du Pont-de-l’Arche ; il y eu 188 pieds de bâtimens (sic) remplis de fourrage, & 2 petites maisons entièrement (sic) consumés, le tout faisant partie d’une grande auberge, apartenante (sic) à un sieur Delaporte, & occupée par un nommé Hareng. Sans le secours des habitans (sic), tout le fauxbourg (sic) auroit été incendié ; le Maire de ville, qui est Lieutenant de Police, voyant les habitans (sic) fatigués, leur a fait distribuer eau-de-vie, boissons & argent, pour ne point quitter jour & nuit, vû (sic) que le feu s’est ranimé à différentes reprises. Les dames de tous états, étoient rangées en haie, depuis la riviere (sic) jusqu’au lieu embrasé, pour donner de l’eau de main en main. L’abbé Denten, vicaire de la paroisse, & le Gardien des Pénitens (sic) s’y sont distingués & ont exposé leurs jours : il y eu 8 personnes de blessées : les incendiés se recommandent aux bienfaits des personnes qui voudront bien les assister, & de les adresser à M. Cavelet ; Maire & Lieutenant de Police, au Pont-de-l’Arche ; ou à Rouen, à M. Sanson, substitut audit Bailliage,  rue du Sacre. »

Le « fauxbourg des champs », n’est autre, aujourd’hui que la place Aristide Briand, en plein cœur de Pont-de-l’Arche. Ce lieu fut rebaptisé  place  « Aristide Briand », en 1937.
Il faudra que nous nous repenchions, un jour prochain, sur la prodigieuse histoire de cette ville, car il y a beaucoup à raconter.



On recherche héritiers

2 juillet 1779

« Anne Marguerite Agnés Langlois, décédée en cette Ville le 30 janvier 1755, veuve du sieur Léon-de-Nesle, a laissé pour héritiers Jean-Baptiste langlois & Robert-François  Langlois, ses freres (sic). Comme depuis le commencement de 1757 on n’a point entendu parler de ces deux freres (sic), & que leurs héritiers ont un droit qu’ils peuvent ignorer, M. le Gingois, Doyen de MM. Les Notaires de cette Ville, les en instruira. »

Encore un héritage qui ne sera pas touché !
D’ailleurs, je ne peux rien vous dire, car mes recherches sont restées vaines !
Comment pouvait-on retrouver quelqu’un en 1779 ?
Pas de carte d’identité, pas d’immatriculation à la CPAM, pas de liste électorale, pas de photo……
Non, rien de tout cela. Uniquement une description physique sommaire qui était peu de chose sans signe particulier.
Voilà pourquoi, il était si facile de prendre l’identité de quelqu’un d’autre, surtout si ce dernier avait été absent très longtemps de son village.


Avis de naissance

2 juillet 1779

« Vendredi 21 mai, la femme Roque de la paroisse de Saint-Ouen du Pont-Audemer en Normandie, âgée de 54 ans, est accouchée d’un garçon. Madame Coignard, épouse du Lieutenant de M. le premier Chirurgien du Roi pour ladite Ville, a terminé cet accouchement avec tout le succès possible, malgré plusieurs obstacles qui pouvoient le rendre impossible ; la mere (sic) et l’enfant se portent bien. »

Cinquante quatre ans ! Je suppose que ce fut son dernier enfant. Mais combien cette femme en avait mis au monde avant ? Je ne peux vous le dire.
Je n’ai pu trouver sur cette famille que l’acte de baptême du petit.
Pont-Audemer -  paroisse Saint-Ouen :
Le samedy deux* de may mil sept cents soixante dix neuf jean Baptiste Jacques fils legitime de Jacques de Laroque et de marguerite Bouyn né d’hier a été baptisé par nous prêtre vicaire de cette paroisse soussigné son parrein Jean Cal, sa marreine marie aimée Louis catherine Delamare laquelle a déclaré ne savoir signer.
* L’acte se trouve entre le « jeudi vingtieme jour de may » et le « dimanche vingt trois de may ». Le prêtre a oublié de noter le « vingt ».
Intempéries

23 juillet 1779

« Je viens d’être témoin, M., d’un de ces événemens (sic) qui arrachent des larmes à toutes les ames (sic) sensibles. Le 9 de ce mois, sur les 5 heures du soir, il s’est formé un orage chargé de grêle, qui est  venu fondre sur la  paroisse de Tancarville, Doyenneté de S. Romain, au pays de Caux. Les grains pesoient une livre la plupart ; en moins de 15 minutes, la récolte entière a été détruite & recouverte de glaçons angulaires à la hauteur de plus de 6 pouces. Il n’y a point eu un pied de terrein (sic) dans la totalité de cette malheureuse paroisse qui n’ait éprouvé ce fléau destructeur ; de sorte que les habitans (sic) ont vu disparoitre (sic), en un quart d’heure, le fruit de leurs travaux & se trouvent par ce désastre sans aucune ressource. Les arbres fruitiers ont été ébranchés en partie, & ne laissent plus d’espérance, même pour les années prochaines. Ce fléau s’est répandu aussi sur une partie des paroisses de la Cerlangue, de saint Nicolas-de-la-Taille, de Radicatel & Saint Jean-des-Essards. »

Cerlangue, Saint-Nicolas-de-la-Taille et Saint-Jean-des-Essarts se situent, en éventail, au nord de Tancarville. Radicatel fait partie de la commune de Saint-Jean-de-Folleville.
Cet article prouve encore une fois, que de tous temps, les intempéries ont provoqué des catastrophes, réduisant à néant le travail d’une année.

Epousailles et retrouvailles…

17 septembre 1779

« On mande de Milan qu’il vient d’y arriver un de ces événemens (sic) bizarres, que toute la prudence humaine ne sçauroit (sic) prévoir. Un jeune homme, reçu dans une maison où il y avoit deux demoiselles, en ayant demandé une en mariage, essuya un refus net, dont il fut piqué, qu’il adressa ses vœux à la servante, qui, d’ailleurs, par la figure, par son caractere (sic) & par sa conduite, sembloit très-propre (sic) à le rendre heureux. Son père (sic) & sa mere (sic) consentirent avec peine à ce mariage ; mais, ayant bientôt reconnu les excellentes qualités de leur bru, ils ne l’aimerent (sic) pas moins que leur fils. Le bonheur attaché à cette tendre union, ne devoit pas être de longue durée. La jeune épouse fut attaquée d’une maladie dangereuse, pour laquelle les Medecins (sic) ordonnérent (sic) de lui appliquer des ventouses. La belle-mere (sic) qui voulut elle-même  présider à l’opération, découvrit alors sur les épaules de sa bru, un signe distinctif qui lui fit reconnoître (sic) sa propre fille, mise dès l’enfance & abandonnée dans l’hôpital de cette Ville. La surprise & la douleur dont elle fut frappée de cet aspect, ne sçauroient (sic) s’exprimer ; elle s’évanouit. Toute la famille alarmée s’empresse autour d’elle, & dès qu’elle a repris connoissance (sic), on apprend de sa bouche, à travers les sanglots & les larmers, cette fatale decouverte (sic). L’aventure pleinement vérifiée, on en instruit les Supérieurs ecclésiastiques, qui ont ordonné provisoirement la séparation du frere (sic) & de la sœur ; & on a informé ensuite la Cour de Rome de cet événement extraordinaire. »

Quelle histoire !
Une enfant abandonnée dans un hospice, sûrement dès la naissance…..
Une mère rongée de remords, face à cet abandon……
Et voilà le destin qui prend sa revanche !

J’aurais aimé en savoir un peu plus, pour retracer l’histoire de cette famille, digne de « Perdu du vue » !
Pourquoi cette petite fille a-t-elle été remise aux bons soins d’un hospice ?
Un enfant né d’un premier amour, avant mariage, et qu’il fallait évincer ?
Un enfant né d’une liaison adultérine, et qu’il fallait dissimuler ?

N’ayant pas en main ni les noms, ni les dates de naissance des deux jeunes gens, je ne peux rien vous affirmer.
Je suppose simplement que le mariage fut annulé.


Avis de décès

29 octobre 1779

« Messire André Guillaume Nicolas France, Ecuyer, Conseiller-Secrétaire du Roi, Honoraire, est mort à Rouen, en son Hôtel, rue S. Nicolas, paroisse Saint Amand, le 28 de ce mois, âgé de 72 ans.  La Société proposera difficilement à ses membres une mort plus consolante, & en même-tems (sic) plus digne de ses regrets. Ce vertueux Citoyen ne cessa de marcher, dès l’âge le plus tendre, dans les sentiers de la religion & de la vertu. Fidele (sic) à ses devoirs & supérieur à tous les événemens (sic), il montra toujours cette tranquillité d’ame (sic), fruit précieux de la paix intérieure dont il jouissoit. Ce fut sur-tout (sic) dans ces derniers momens (sic), où sa famille, abandonnée à la plus amere (sic) douleur, faisoit apercevoir ce mélange involontaire de tendresse & de crainte, qu’il tâchoit de la consoler lui-même. Il étoit doux dans ses mœurs, agréable dans son commerce, fidele (sic) à ses amis, tendre & compatissant envers les pâuvres (sic). La culture des Lettres occupa ses loisirs, & l’on remarquoit avec plaisir cette expression de bon goût qui caractérise l’homme aimable, sans affoiblir (sic) celui de l’homme de bien. Un tempérament délicat que le travail avoit épuisé, ne devoit pas résister plus long-tems (sic) à une maladie aussi longue que douloureuse. Le mal augmente, ses forces insensiblement diminuent ; enfin un assoupissement s’empare de ses sens, & Dieu, qu’il avoit fidelement (sic) servi, l’appelle à lui dans sa miséricorde, & le fait reposer du paisible sommeil des justes. »

Ci-dessous, l’acte de décès de ce seigneur :
Rouen – paroisse Saint Amand
Ce jourd’huy jeudi vingt huit octobre mil sept cents soixante dix neuf a été inhume dans le cimetiere par monsieur le curé de cette paroisse le corps de messire andré guillaume nicolas France ecuyer conseiller secretaire du Roy honoraire veuf en secondes noces de dame Leplanquois veuve de M de la houppe de Breteuil décédé hier age de soixante douze ans muni des Saints sacrements de l’Eglise presence des témoins soussignés
Signatures : Pierre Prevost – Godefroy et Marest curé de St amand.

Malgré mes recherches je n’ai rien trouvé de plus sur ce seigneur, ni sur sa seconde épouse.


La Mare du Parc en feu

31 décembre 1779

« Des personnes mal informées, débitent dans le public que M. Valentin, Curé de la paroisse de S. Sever, a empêché de sonner le tocsin pour l’incendie arrivé Dimanche dernier, 26 décembre 1779. Il arrive souvent que des voisins s’alarmant de voir des étincelles, même des flâmmes (sic) sortir des cheminées de ceux qui, dans des greniers, brûlent des bruyeres (sic) viennent demander à faire sonner, & qu’avant que les ordres soient donnés, l’on apprend qu’il n’y a eu aucun danger.
Dimanche dernier, pendant les Vêpres, le sieur Curé fut informé que le feu étoit à une cheminée près la mare du Parc, cherchant  à éviter l’épouvante à ses paroissiens assemblés en prieres (sic) il voulut être informé de l’état des choses par un exprès qu’il envoya ; 2 minutes après au plus, survint un domestique qui le pria de faire sonner au feu : le sieur Valentin lui demanda si c’étoit à une cheminée ; il lui répondit que non, que la maison étoit en feu ; aussi-tôt (sic) il quitta sa chappe (sic), entra dans la sacristie, donna des ordres au bedeau de sonner ; ce qu’il fit aussi-tôt (sic), & ne s’interrompit   que pour donner le salut ; recommença ensuite, & continua jusqu’à 7 heures du soir.»


Un incendie à la Mare du Parc à Saint-Sever. Mais quel était donc ce lieu ?
Son nom vient d’une mare qui se trouvait dans un parc donné par Henri II au prieuré de Grammont.
Fin XIXème siècle, ce terrain de la Mare du Parc se situait  à proximité du Jardin des plantes de Rouen.
Aujourd’hui, son nom a été donné à la rue longeant cet ancien terrain, rue qui aboutit dans la rue Emile Zola à Sotteville-Lès-Rouen.

Prieuré de Grammont
Le roi Henri II Plantagenêt avait donné une partie de la forêt de Rouvray, ancien parc de chasse, aux religieux de l’ordre de Grammont qui s’y installèrent entre 1154 et 1180. Les chasses incessantes gênaient les religieux, aussi le roi leur fit don, également, de son parc et des prairies environnantes, d’où son nom Notre-Dame-du Parc.
En 1770, les dix derniers religieux, 9 prêtres et un frère, furent expulsés du lieu et leurs biens furent vendus.



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