lundi 1 mai 2017

QUE FAIRE ? Chapitre 8



« Tu n’étais pas invitée, aujourd’hui ? » demanda Caroline en posant les assiettes et couverts sur la table.

Jeanne ne répondit pas à la question que venait de lui poser sa mère.
N’obtenant pas de réponse, Caroline observa son ado de fille sans ajouter un mot. Quelque chose dans son attitude avait changé. Elle était toujours renfrognée, certes, c’était son habitude, mais elle ne bougonnait plus et ça s’était inhabituel !
Jeanne ne faisant plus de réflexions !
Jeanne ne se révoltant plus !
Jeanne emmurée dans un mutisme !
Et surtout, et là alors, cela devenait inquiétant, Jeanne assise au bout de la table plongée dans un livre !
Il fallait, assurément, appeler les urgences !

Caroline prit place à côté de sa fille, lui prit le livre des mains, en consulta le titre et dit :
« Un très bon livre. Lorsque j’avais ton âge, j’adorai Jules Verne. Je crois bien que j’ai lu tous ses romans. »
Puis, refermant le livre et le posant sur la table, elle poursuivit :
« Qu’est-ce qui se passe, ma Jeannette ? »
En guise de réponse, Jeanne haussa les épaules.
« Je peux faire quelque chose pour que le sourire revienne sur le visage de ma petite fille ?
-          Je suis plus une petite fille ! lança Jeanne.
-          Sur le visage de ma grande fille alors, rectifia Caroline.
-          Tu te moques de moi ! D’ailleurs, ici, tout le monde se moque de moi, se révolta Jeanne avant d’éclater en sanglots et de s’enfuir au fond du potager.

Caroline ne fit rien pour retenir sa fille. Il valait mieux la laisser se calmer. Elle feuilleta machinalement le livre de Jules Verne, soupira et s’apprêtait à rejoindre sa fille quand tante Adélaïde, revenant du poulailler où elle avait donné du grain aux volailles, entra dans la cuisine.
« Que se passe-t-il ? Je viens de voir Jeanne partir en courant. Je crois bien qu’elle pleurait.
-          Oui, en effet, soupira Caroline. Je n’arrive plus à la comprendre. Elle si douce, si calme.... Un vrai volcan !
-          La chrysalide se transforme en papillon, Caroline. Tu ne te souviens pas ? C’est l’âge où l’hypersensibilité est la plus intense. Je crois que maintenant les médecins disent que ce sont les hormones !
-          Tu as raison, tante Adélaïde, répliqua Caroline en éclatant de rire. En attendant, je vais voir où en est la crise hormonale de ma fille.

Caroline trouva l’adolescente assise sur le banc du potager. Elle mangeait les fraises qu’elle venait de cueillir.

« Bon signe ! pensa Caroline. Le moral ne doit pas être si mauvais, car quand l’appétit va, tout va ! Enfin presque. »

Sans un mot, Caroline vint prendre place près de sa fille. Après un petit moment, elle rompit le silence :
« Elles sont bonnes ?
-          Quoi ?
-          Les fraises ?
-          Oui, ça peut aller !
-          OK, pensa Caroline. Si ça peut aller, c’est déjà un début. » Puis elle se risqua à poursuivre. « Tu veux faire quoi, aujourd’hui ? Il y a quelque chose qui t’intéresserait ?
-          Ah oui ! Et sans voiture, on peut faire quoi dans ce bled ?
-          Pas faux ! répondit Caroline. Je suis vraiment désolée de t’imposer des vacances aussi détestables. Mais, dis moi, est-ce que je pouvais laisser tante Adélaïde toute seule ?

Premier haussement d’épaule de la part de Jeanne.

« Je devais lui dire, Bah, débrouille-toi ! En clair, tu n’es pas si âgée que cela, alors, avance ! »

Autre haussement d’épaule de la part de Jeanne.

« J’ai une petite fille... oh, pardon ! J’ai une grande fille et elle passe avant tout, alors tu comprends.... »

Encore un haussement d’épaule de la part de Jeanne.

« Tu sais, tante Adélaïde est la seule personne de ma famille qui me reste, maintenant que l’oncle Ernest n’est plus là. Elle compte beaucoup pour moi, et si elle me demande encore de l’aider, et bien Jeanne, je le ferai encore et encore. Tu comprends ? »

Haussement d’épaule, encore et toujours, de la part de Jeanne.

« Je t’entends penser : « Encore une leçon de morale ! ». Non Jeanne, je t’explique simplement.... Tu sais ce garçon, je ne sais plus son nom.....
-          Cédric
-          Oui, voilà ! Il t’a invitée et tu devrais y aller. Tu serais avec des jeunes de ton âge et tu pourrais t’amuser un peu. A ton âge, on fait vite connaissance. Va ma Jeannette et sèche tes larmes.

Caroline se leva et laissa Jeanne sur le banc, mais avant de sortir du potager, elle se retourna et, avec un large sourire, elle lança :

« Tu sais, Jeannette, lorsque tu souris, tu es très jolie ! »

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